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jeudi, 23 février 2012

ALLER AU BARON LE SAMEDI

Par
illustration

Ils sont très bons les nems pannés au curry de ma soirée du boulot. C’est peut être pour cela que je squatte le buffet à l’affut des nouvelles verrines apportées par les serveuses. Tu me filerais 4 euros, je te jure, je ressemble à une pub de l’UNICEF tellement mes yeux crient BOUFFEBOUFFEBOUFFE avec intensité.

Des fois, quand même, je quitte le périmètre des tranches de saucissons pour discuter avec la rédaction mode. Entre deux scénarios ou l’on imagine qui on se taperait bien au bureau (je te filerais pas de noms), je me prépare doucement à aller me pieuter. Sans moi la soirée 90’s auquel nous sommes censés tous aller après. Ma passion pour Larusso ne peut être partagée au milieu de surexcités pleins de sueur. Tu m’oublieras surement, mais moi j’ai encore l’odeur de ta transpi dans le nez bébé.

Marijke a aussi prévu de bouger, c’est ma voisine et aussi ma super collègue de travail, son frère bosse dans la musique, ce soir il l’a invité au Baron, dépucelage de la hype, elle me promet de me raconter lundi.

Ou peut-être maintenant, en fait.

Son frère lui propose de venir avec une amie. Son regard se pose sur moi.

“Tu dis oui ? »

« Dis oui”

Bisou les nems, on se revoit au niveau de mes cuisses demain et direction boulevard Marceau, prête à faire une duckface à côté d’André pour le Purple. Allez, au pire, ça fera un bon article pour Retard, hein.

Après 45 minutes de métro on arrive en face, à droite ya un Picard, c’est marrant. Et ouais, même si t’es coule, sache que les purées de carotte congelées sont logées à la même enseigne que toi, et sont peut être plus sympas encore.

Le vigile tout secos ( DÉCEPTION ! Pourquoi il est pas gros ?) à notre vue ouvre son petit cordon de velours pour nous laisser entrer. Merci mon chou. A l’intérieur on s’apprête a se désaper devant une fille qui a les mêmes lunettes de Derrick quand surgit de sa bouche laquée un “Nan, désolée, ya pas de place au vestiaire”. Je garderais mes affaires avec la classe, ma cape a 20 euros de chez Guerrisold mérite de toute manière d’être vue.

La porte s’ouvre. Le rédacteur en chef mode nous avait prévenus quand on finissait les acras de morues : “ Le Baron c’est une sorte de couloir avec une piste en fond, c’est tout petit”. La description a fait naitre instantanément dans mon esprit un pénis monocouille, j’aurais pas du mélanger les alcools ça me rend vraiment vulgaire, pourtant ça semble être exactement cela.

Face au comptoir étriqué des portraits de meufs à poil sortent tout droit d’Emmanuelle sans le fauteuil en rotin (et les petits peignoirs non plus SI TU VOIS CE QUE JE VEUX DIRE). Ensuite, autour d’un dancefloor rond et minuscule (sans dec, à 30 t’es serré) s’organisent des banquettes capitonnées de velours suaves et sur les murs, des miroirs dans lesquels je peux remarquer que mon mascara a coulé. Ils seront parfaits plus tard pour voir si mes seins bougent pas trop de l’endroit ou je les ai mis.Tout flotte dans une ambiance sulfuro chic, la lumière rouge donne l’impression d’être dans le sous sol d’un pervers classieux en train de développer ses photos fétichistes, c’est un peu sexy sale mais peut être que dans ma tête. Cela rappelle les discothèques un peu humides et sexuelles des films des années 70, ça me donne envie de faire la gueule sur une des banquettes en fumant des clopes, boudant comme seule Miou Miou saurait le faire.

J’essaie de me faufiler mais un grand bouclé bloque le passage avec son blouson où s’affiche le logo NBC.

C’est Gaspard de Justice.

WAHOU BAH DIS DONC QUAND JE DIRAIS ÇA AUX COPAINS ILS EN AURONT RIEN A FAIRE MAIS TANT PIS.

On arrive à s’installer autour d’une table, le panorama est idéal. A ma droite ya Aure Atika, qui a la chance de mater mon meilleur profil, celui ou ya pas trop de boutons.

WAHOU BAH DIS DONC QUAND JE DIRAIS ÇA AUX COPAINS BAH ILS ME DEMANDERONT DANS QUEL FILM ELLE A JOUE ET JE SAURAIS PAS DIRE.

Les gens ont l’air parisiens “je te calcule pas à moins que tu puisses m’aider pour mon groupe/ label/ magazine/ carrière d’acteur/ projet pourri auquel je crois pas mal quand je suis bourré”. Pas mal de derrières (parfois gros, et oui) moulés dans des jeans APC et de chevelures qui font des gros doigts aux coiffeurs et aux brosses du monde entier. Tout le monde porte ici la barbe et semble sortir d’un clip d’Ed Banger, chaussures blanches et chemises de bucherons assorties. Je note.

On me tapote d’un coup l’épaule. C’est le vigile tout maigre,

COUCOU MON CHOU

“Des gens ont réservés, vous pouvez vous lever ?”

On l’ouvre pas (t’es fou ?) et on s’exécute. On s’installe à une autre table, plus planquée, où je finis de siroter un gintonic que je me rappelle pas avoir payé (Marijke je dois de la thune à ton frère j’ai zappé désolée). D’un coup excitation moite, HAN, face à moi vient de s’installer le dos sublime de Romain Turzi (enfin je crois), HAN, je bave sur lui à chaque exemplaire de Technikart qui en parle. Son gilet beige est constellé de taches, je trouve ça cool de mettre des trucs sales dans un lieu comme celui ci (il est foufou) jusqu’a ce que Marijke me rappelle qu’en fait il pleut dehors. Re-déception.

On me retapote l’épaule. Le vigile tout maigre revient (j’ai une touche ou quoi).

“Des gens ont réservés, vous pouvez vous lever ?”

Je vois au fond de ses yeux que mon regard de bébé dauphin orphelin n’y changera rien. On se reéxecute. Tous debout sur le dancefloor, j’esquisse deux pas mais j’y arrive pas trop, mes coudes sont serrés au niveau de ma taille, sept heures avant je donnais tout sur mon carrelage à Marx Dormoy sur un Beyoncé à blindos pour faire chier les voisins, là je reconnais aucun des morceaux que tout le monde reprend en coeur et de toute manière j’ai pas la place de LAISSER EXPRIMER MON CORPS. Sur la piste pourtant il y a une fille qui vit la musique, elle fait semblant de faire l’amour au plancher, pendant que ces copines hystériques hurlent au mauvais moment sur des solos de guitares beaucoup trop longs.

J’en suis pas là. Amour propre plus 1.

C’est un peu fatiguant quand même. Marijke me dit qu’il faut pas qu’on rate le dernier métro, je baille pas mal alors c’est pas une mauvaise idée. On chope nos affaires qu’on a pu mettre dans un coin et on dit aurevoir à notre gentil hôte (à qui je dois maintenant des sous), direction la sortie, mon lit, et le vrai Paris qui sent le pipi.

Devant le comptoir étriqué menant vers la sortie je recroise Romain Turzi, mais de face.

TOI MÊME TU SAIS QUE C’EST LÀ QU’IL FAUT QUE QUELQUE CHOSE SE PASSE. MARINE ALLEZ DONNE TOI, c’est tellement serré que mes seins se frottent à son torse

(Et c’est tout.) HAHAHAHA AMOUR PROPRE PLUS DEUX, QUI C’EST QUI POURRA Y CONSACRER DEUX PAGES RECTO VERSO DANS SON JOURNAL INTIME ?

C’était presque pareil.

On se rhabille devant Teki Latex, en cochant mentalement sur notre liste de choses à faire “aller dans un endroit hype”. On s’est frottées aux branchouilles et finalement ça fait pas grand chose. A part avoir des tables plus facilement au Baron, ça porte des jeans comme nous, ça se lave quand ça a le temps, ça se fait chier parfois devant des gens inintéressants, et ça a des copines qui foutent la honte.

Enfin, ça fait pas grand chose sauf si tu frottes tes seins sur la poitrine de Romain Turzi quoi.

HINHINHIN

COUCOU ROMAIN

Marine

Leader Autoritaire
Marine est née en 1986 et vit avec un petit chien trop mignon. Après avoir joué avec des groupes de filles ultra classes d'après les autres membres (Pussy Patrol/Secretariat/Mercredi Equitation), elle gagne sa vie en écrivant sur des sujets cools et se la pète déjà un peu. Ca ne l'empêche pas de traîner en pijama dégueulasse le dimanche en essayant de twerker mal sur du William Sheller. L'AMOUR PROPRE C'EST DÉMODÉ OKAY.

Anna Wanda

Directrice Artistique et illustratrice
Anna est née en 1990 et se balade avec un collier où pend une patte d'alligator. Graphiste et illustratrice particulièrement douée (sans déconner), elle n'est pas franchement la personne à inviter pour une partie de Pictionnary. Toujours motivée et souriante, c'est un rayon de soleil curieux de tout et prêt à bouncer sur un bon Kanye West, tout en te parlant de bluegrass. Par contre, elle a toujours des fringues plus jolies que toi. T'as donc le droit de la détester (enfin tu peux essayer, perso j'y arrive pas). SON SITE PERSO: http://wandalovesyou.com