RETARD → Magazine

vendredi, 13 avril 2018

Dis moi oui, Orties

Par
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Vendredi, 11h47. J’ai craqué. Comme une envie de me cogner la tête sur toutes les touches de mon clavier azerty en même temps. C’était celui du boulot donc ça se faisait pas, mais la fatigue a tout défoncé à l’intérieur, la petite goutte d’eau a fait déborder le vase. Comme dirait Eddy de Pretto, j’ai écouté le morceau pourri de trop.

Avec un peu de recul, ça s’explique facilement. Cela fait quand même quatre ans que je m’enfile sans rechigner les clips de sous-Isabelle Adjani 80’s qui chantonnent mollement sur une production pétée au synthé. Tu choisis la coupe cheveux longs avec la grosse frange, la bonne moue de gamine boudeuse en mode première collection de Jacquemus (et pas la dernière, coeur sur toi Simon Porte, tu sais que t’es le meilleur), tu fous tout ça dans un levi’s et un crop top super propres dans un clip avec des couleurs criardes, et puis t’attend. Ça remplit mes boites mail professionnelles comme celle de Retard à la même vitesse que la bière les vessies d’un vendredi soir, ça remplit vos dj sets aussi aseptisés et chiants qu’un « entrepreneur » sur tinder. Ça sort sur vos labels que vous avez créé viteuf quand vous avez senti que ça allait le faire et qu’il fallait vite prendre le filon. Vous filez ça à des attachés de presse qui savent même plus quel vocabulaire utiliser pour donner envie, ayant déjà cité 76 fois le Week-end à Rome de Daho.

“Hello Marine, dis moi ce que tu en penses”

T’as pas envie, je te jure que t’as pas envie.

Facile de les reconnaitre, j’ai même pas besoin d’ouvrir les mails (je les ouvre pas sur Retard, d’ailleurs). Le nom de groupe est en français en mode débile chouki, le nom du single est du même acabit, c’est de la pop mou du genou, on appelle ça « éthéré » quand on essaie de varier. Ils essaient d’infuser une fausse nonchalance qui pue autant l’antimite que les vieilles robes de ma mère, alors que ça prend de la coke à partir du jeudi et que ça pine au kilomètre des influenceuses identiques trouvées sur instagram.

#paris #look #bandeoriginaledemavie

Au début c’est vrai j’ai succombé, prise par par le petit tourbillon de la hype, grosse bouffonne que je peux être. J’ai trouvé ça frais, un peu comme quand t’ouvres ta fenêtre après avoir fait l’amour un weekend tout entier. Et puis au bout d’un moment tu commences à te cailler, alors tu aimerais bien refermer, mais t’y arrives pas. Et les petites chanteuses rentrent au kilomètre, prêtes à faire rimer « aimer » et « bouder ».

Sans déconner.

Tu sais et je le sais aussi poussin, ya eu Elli et Jacno, ya eu Gainsbourg et Bardot, mais yaura pas ton duo.

J’ai craqué parce que j’aime bien quand c’est chanté en français mais que votre créneau rétro j’en peux plus, putain, vous prenez tous le même, ya six ans vous espériez tous bosser avec Brodinski et là hop vous changez aussi vite votre fusil d’épaule qu’un membre des Républicains qui a appris qu’il pouvait postuler pour la République en Marche. C’est facile de vous reconnaitre en plus, en fouillant un peu sur internet on découvre rapidos que vous faisiez du mauvais rock ya 10 ans, du mauvais électro ya 6, et ya pas mal à parier que dans deux ans, vous ferez du mauvais hip-hop. Des fois je me dis que l’élection de Macron a du réveiller un truc chez vous, cette envie de création mollassonne, qui ne prend aucune grande décision, un truc aussi fade qu’un week-end hors saison aux Grandes Mottes.

Oui, évidemment, il y en a des biens. Déjà, quand il y a un effort d’écriture, de production, et qu’en nous rejoue pas pour la 7852000 fois le plan de la muse envoutante et du producteur enchanté. Mais pitié quoi, drapeau banc. Vous êtes bien assez.

En me tapant le énième single aussi mou certainement que l’érection du vingtenaire qui joue du moog avec deux doigts, je me suis demandée ce qui pourrait être à l’exact opposé.

Je me suis rappelée Orties, que j’avais adoré détester à la sortie de leur album Sextape. Elles posaient à poil sur la pochette, bossaient avec Mirwais, volaient des trucs pendant les interviews qu’elles accordaient. Putain. A l’époque, elles m’insupportaient. Je me suis même souvenue de ma tête désabusée quand Houellebecq les avait remises sur le tapis dans le numéro des inrockuptibles dont il était le rédacteur en chef, en disant que yavait Mirwais à la production, et que c’était quand même bien, Mirwais à la prod.

ORTIES | PARIS POURRI (CLIP)

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Tout m’énervait.

Les soeurs Antha et Kincy, étaient à n’en point douter le prototype de meufs que j’aurais bien aimé être si j’avais eu un peu de charisme et de courage. Mais ça plutôt crever que de l’avouer. Depuis je me dis que j’avais bien tort. Comme d’hab je m’étais énervée parce que j’avais pas compris, et peut-être aussi qu’il n’y avait rien à comprendre : elles dressaient juste un état de fait que je voulais pas voir, moi qui ne rêvais que de mettre Paris à mes pieds et qui depuis m’était bien mangé les dents.

La capitale 1, Normand dans les dents.

Orties - La Boum

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Orties, c’est pas bien fait et ça s’en fout. Ça sent les jupes en plastique de Belleville qui puent le pétrole, la bière sans bulles agrémenté d’un parachute de MD, les mâchoires qui claquent au Soleil de la Butte, les chaussures New Look qui pètent dans les rues pavées.

Orties c’est aussi sale que les rues de paris avant le passage des éboueurs. C’est aussi pété que les couloirs du métro qui s’effritent à cause de l’humidité, mais ça tient plus debout que tous les minets devant Garage band.

Alors Orties,

Je m’excuse et me passe Paris Pourri en boucle, ça va bien avec la nuit et la pluie dans la capitale.

Je crois en fait, maintenant de ma sagesse de trentenaire qui bosse dans la culture, que ses meufs avaient déjà tout compris, cinq ans avant. Peut-être qu’en 2018, elles sont l’une des seules réponses écoutables à toute la merde en dégradés pastels servies par les labels, les marques, les médias, vos comptes instagram et les miens, les vidéos youtube de votre feed Facebook et vos soirées au Pop-Up du Label.

Peut-être que ce qu’on a besoin maintenant, entre deux mauvais, très mauvais, François de Roubaix à la recherche de son égérie, c’est de deux soeurs jumelles à tendance gothique de région parisienne qui rappent et qui mettent un poil de merde et de drogue dans leurs morceaux. Peut-être que c’est bien plus féministe que de se taper les podcasts mous du genoux censés être inspirants.

Dans ce monde où on est tous moulés dans des chemises en jean fermées jusqu’au dernier bouton et où on se demande combien de dégradés de beige on peut mettre dans une seule et unique tenue (la réponse est ZÉRO, CHANGE TOI ET CHANGE TOI VITE), je m’aperçois qu’il y a des choses qui me manquent dans les tableaux impeccables qu’on essaie tous de dresser, comme si on ne connaissait pas les imperfections de la réalité. De l’honnêteté, un peu d’odeur de pisse, du rouge à lèvres qui déborde et de petits noeuds de strings qui dépassent. Ça manque de robes trop courtes, de talons trop hauts et de rimes trop lourdes.

Orties, j’aimerais bien que vous reveniez vous savez. Moi et le monde n’avons jamais été aussi prêt.

Marine

Leader Autoritaire
Marine est née en 1986 et vit avec un petit chien trop mignon. Après avoir joué avec des groupes de filles ultra classes d'après les autres membres (Pussy Patrol/Secretariat/Mercredi Equitation), elle gagne sa vie en écrivant sur des sujets cools et se la pète déjà un peu. Ca ne l'empêche pas de traîner en pijama dégueulasse le dimanche en essayant de twerker mal sur du William Sheller. L'AMOUR PROPRE C'EST DÉMODÉ OKAY.

Anna Wanda

Directrice Artistique et illustratrice
Anna est née en 1990 et se balade avec un collier où pend une patte d'alligator. Graphiste et illustratrice particulièrement douée (sans déconner), elle n'est pas franchement la personne à inviter pour une partie de Pictionnary. Toujours motivée et souriante, c'est un rayon de soleil curieux de tout et prêt à bouncer sur un bon Kanye West, tout en te parlant de bluegrass. Par contre, elle a toujours des fringues plus jolies que toi. T'as donc le droit de la détester (enfin tu peux essayer, perso j'y arrive pas). SON SITE PERSO: http://wandalovesyou.com