Ça demandait une belle coordination de mouvements.
Après être tombée amoureuse au matin du BMX dans le clip sur M6 (ouais le VÉLO, pas le type sur le vélo), fallait absolument que je chope le morceau pour ma compile. Je savais qu’à tout moment The Young MC de Superfunk pouvait passer sur Fun Radio, alors à chaque jingle, sueurs froides et pouce prêt à appuyer sur « record » pour capter pile au bon moment le début du morceau. C’était ça la magie des compiles sur K7, c’était ça le walkman pour pas écouter la chiantitude des parents dans la voiture, c’était ça la French Touch et les morceaux que tu gardes à vie dans ton cœur.
Ma meilleure amie du primaire avait voulu m’influencer avec des compiles de Makina, et honnêtement y’en avait 2-3 que j’écoutais en boucle. En plus des albums de Nilda Fernandez de mon père. J’avais 10 ans, et mes goûts musicaux étaient aussi moches que la mèche jaune pipi au milieu de mes cheveux gras.
Ah quelle époque ingrate. C’était quoi ce vide intersidéral de goût?
Pour re-situer on peut dire que comme d’habitude, c’était pas Thatcher qui avait aidé les choses.
En 1988, le progressif exil des grandes raves techno britanniques vers la France permet cependant -merci mamie- à 2 ou 3 jeunots d’en prendre plein la figure : les petits Laurent Garnier, Étienne de Crécy et Philippe Zdar par exemple, chaperonnés de loin par le grand Ceronne. Déjà érudits en disco, funk et soul, c’est ce mariage avec la house classique qui fait d’eux de vrais génies. Le mouvement, d’abord marginal, commence à prendre de l’ampleur dans les années 95 avec l’ajout à l’équipe de Daft Punk, St Germain, ou encore Motorbass. Ça commence à plus rigoler avec les échanges de maxis. De mon côté, je fais des tresses avec Edwina, mais prépare déjà sans le savoir mon amour pour la French Touch en m’égosillant sur les tubes disco de sa boom d’anniversaire.
1998, 3 gros chocs : Mon premier roulage de pelle avec Mathieu, la coupe du monde, et Music Sounds better with You de Stardust.
Derrière ce chef d’oeuvre, Benjamin Diamond (Futur fondateur du label Diamondtraxx), Alain Braxe et Thomas Bangalter (moitié de Daft Punk). Je les imagine dans leur chambre en train de composer. Ils ont pile mon âge et se font chier comme des rats morts. L’un d’entre eux a ramené une pile de 45T de disco, et parmi eux, y’a ça :
Alain : « ok les gars on a notre prochain sample pour la soirée au Rex. Benjamin arrête de tortiller du cul et viens poser ta voix »
Thomas : « Putain génial, on va enregistrer un maxi tout de suite et le sortir sur mon label! »
Direction les clubs à Miami dans une semaine, en faisant un gros fuck aux majors. Quelques mois plus tard Michel Gondry accepte de tourner le clip, et leur succès leur coute même d’être la bande sonore des meetings du RPR. Moche.
C’est aussi pour ça que je les aime tant. Ils utilisaient et revendiquaient le même système que moi et mes groupes que personne n’écoute. Une incroyable liberté à pouvoir créer dans son salon, et puis décider quand ils veulent et où ils veulent de sortir un vinyle ou une k7, sans attendre en mouillant la culotte l’intérêt d’Universal ou EMI. Là où ils ont étés bien plus malins, c’est de faire de l’électro plutôt que du punk pourri. ON CHOISIT PAS SON PUBLIC.
Et puis 2000, toujours pas de bon goût vestimentaire, mais la chanson qui va rester à vie dans mon baladeur. LADY de MODJO. Gros choc. Le riff de ma vie (sample du morceau Soup For One de CHIC). Une mélodie à la fois tellement mélancolique et tellement sexy. Et puis ce clip, 2 gars 1 filles aux milieu des États-Unis du beauf, qui décident sur un coup de tête de s’acheter une bagnole et faire ce qu’ils veulent, sans s’arrêter, sans but. Y’a pas vraiment de fin, à part ce gros plan en contre-plongé sur eux qui regardent le vide en souriant. Comme une manière cynique d’emmerder le trou-noir de leur/mon avenir. 12 ans plus tard, je vois qu’autour de moi, on s’est toujours pas remis de cette chanson. Ni de nos problèmes de futur d’ailleurs.
Je pourrais encore en citer des dizaines, Cassius, Phoenix, Mr Oizo, Sébastien Tellier, Bob Sinclar, The Superman Lovers, Demon, Alex Gopher….
J’ai jamais pu décrocher des morceaux de ces années là, et si j’avoue quelques petits moments d’éparpillements avec Yannick et Eiffel 65, c’est avec la larme à l’oeil que je réécoute mes compiles Starfloor 2001. Doit y’avoir de la nostalgie là dedans, mais pas que, ces types avaient tout compris, ils ont su tirer le meilleur du disco ou de la funk pour en faire des tubes électro. Et personne ne s’en plaint à mes booms d’anniversaires, certifiées les meilleures depuis 1998.
Enfin cher poussin, parce que ça me dérange pas que tu fasses les mêmes fêtes de la mort, voici un échantillon de la playlist de tes rêves (pardonne ma digression avec les prod anglophones) :
Superfunk - Lucky Star
Superman Lovers - Starlight
Modjo - Lady
Mr Oizo - Flat Beat
Cassius - 1999
Armand Van Helden - You don’t know me
Kylie Minogue - Love at first sight
Daft Punk - Around the world
Jamiroquai - Love Foolosophy
Basement Jaxx - Do your thing
Spiller - Groovejet