Salut l’ami, tu es sans le sou mais tu as un petit coeur qui bat ? Tu veux épater une inconnue à peu de frais ? Tu cherches à relancer ton couple sans te planter ? Tu voudrais briller dans Paris mais quand tu passe devant Métronome a la Fnac y’a ça qui tourne en boucle dans ta tête ?
Ne panique pas on s’occupe de tout. Ne reculant devant rien pour étoffer ta culture on te sert ton prochain rencard sur un plateau. Potache ton petit guide, donne rendez-vous au métro indiqué et on te promet que tu vas t’en sortir. Prépare toi, bientôt tu seras la star d’adopte un mec.
Aucun article de Wikipédia n’ayant été maltraité pendant la rédaction de ce guide; les plus coriaces utilisateurs de Smartphones resteront sur le cul quand même !
Au fait, ce guide est absolument unisexe voire même transgenre. C’est pas parce qu’il a été rédigé par un garçon qu’on ne rêve pas nous aussi d’une jolie visite apte à nous faire péter le soutif et vibrer notre petit cœur tout mou …
Aujourd’hui :
L’église Saint Gervais Saint Prothais (Paris, Rue de l’hôtel de Ville IVeme, Métro Hôtel de ville)
Population : Pas mal de moines et de sœurs, quelques touristes un peu perdus et des fidèles. Possibilité de tomber sur un SDF qui prend le chaud avec toutes ses affaires. 3/5
Confort : Chaises toute neuves à profusion au centre, bac sur les côtés, chauffage pendant les messes… Rien à dire c’est la grande classe. 4,5/5
Atmosphère : Presque un sans-faute. Lumineuse, sentant bon l’encens, très claire. On est ici en présence d’une église d’été. Messe chantée en Latin à 18h30 tous les jours. Si ça peut en déranger certains, d’autres adoreront (choisissez bien votre heure …) 4/5
Cadre général : Bloqué entre le Marais et les quais de Seine, ça reste assez peu original… La petite place entre la sortie et les quais rattrape un peu le coup. 2,5/5
Probabilité d’emballer : 14/20

Si il l’a fait, pourquoi pas toi ?
Alors une fois devant l’église on passe rapidement sur la superposition des trois ordres de colonnes en façade. Remarquez bien qu’elle n’est pas contemporaine du reste du bâtiment. Et oui elle remplace la façade gothique prévue, qui n’a jamais été définitivement terminée. Un mélange assez original de fronton classique sur une base gothique du coup. Ca accroche pas en face ? Allez-y à fond et précisez que le demi-cercle situé au premier niveau représente la terre et le fronton triangulaire pointe vers le ciel, synthèse entre le terrestre et le divin. Niveau entrée en matière ça a quand même de la gueule non ? Attention quand même, comme eusse eu dit Voltaire (Parfaitement, « Eusse eu dit » ne lésinez pas sur les conjugaisons !) qui a salué la beauté de cette façade : « Pelle bien roulée vaut mieux que discours assuré», je sais pas si c’est vraiment lui ou Rousseau, mais la Pompadour en a encore les joues rouges.
Si à la place d’une façade d’église on se retrouve devant des rayons d’outillage, pas de panique, vous vous êtes plantés de sortie de métro et c’est le sous-sol du BHV. N’hésitez pas à trouver un tournevis émouvant artistiquement pour vous en sortir.
Donc une fois cela fait on rentre dans l’église, n’oubliez pas de préciser que les moines qui prient au fond appartiennent à la fraternité de Jérusalem, qui lutte contre l’isolement et la misère affective de ceux qui traversent le désert Urbain. Ça soulignera intelligemment vos solitudes respectives. Ensuite osez carrément le petit topo sur l’histoire de l’église, construite au XVème sur la base d’une église Mérovingienne et retapée pendant la contre reforme (quand l’église catholique avait peur que les protestants lui pique tous ses ouailles et se la jouait bling bling) d’où son aspect général relativement lumineux et riche. Transformé en temple de la raison pendant la Révolution (Regardez autour de vous, il n’y a pas de symboles royaux ou de tombes, on les a détruites entre 1793 et 1794). Avancez un peu et enchainez sur l’obus de grosse Bertha qui a frappé l’Eglise un vendredi de 1918.
Ensuite faites confiance aux petit panneaux descriptifs devant chaque chapelle et aux petites précisions qu’on vous donne bien gentiment juste en dessous. En bonus un petit topo sur les vitraux, parce qu’à part vous taper 30 minutes de queue pour la sainte Chapelle vous en verrez pas beaucoup des aussi jolis et de toutes les époques (Merci l’obus qui a tout fait sauter). Alors on essaye de choisir un dimanche ensoleillé, on lève la tête et on compare les motifs historiés des vitraux XVI, et ceux abstraits du XXème, commencés par Anne le Chevalier en 1976.
Ce petit aperçu général fait, suivez le guide !
LES XIV STATIONS DE LA DRAGUE DE TONTON Jean
I.
On commence par le monument aux 91 noms des tués par l’obus de 1918 à 16H27. Il y a en fait eu 103 morts, alors on pense un peu à tous ceux qui ont été oubliés …
II.
Levez un peu la tête pour voir les vitraux contemporains de Gaudin et Courageux aux formes et couleurs pastels. Oubliez pas de préciser qu’ils datent de 1995 et que Sylvie Gaudin étant décédée en 1998 son mari prend la suite (et oui ce chantier n’est pas fini, et cette église est placé sous le signe de l’amour)
III.
Ne boudez pas votre plaisir, prenez-vous la main assis sur un siège en regardant prier l’ordre. Si il y a une messe en cours ils vont faire peter la guitare et ce n’est pas si degueu à entendre !
IV.
Une décollation de Jean Baptiste écrit en dessous « capite truncatus est », ça veut dire décapiter en latin, et regardez autour de vous sur les fresques, ça capite truncate un peu partout ….
V.
Un beau vitrail XVI sur le jugement de Salomon (Le roi biblique qui découpait tout en deux pour par décider). Petit anecdote sur les vitraux qui ont été restauré en 1892, endommagé par un attentat anarchiste pas très loin.
VI.
Bingo on arrive au tombeau d’un chancelier de France (quand on te le demandera c’est Le Tellier) posé un peu la parce que c’est la mode. Parce que Le Tellier a cotoyé tout le gratin de la France, il buvait des canons avec Colbert, Mazarin et son fils c’est Louvois. En plus le tombeau est fait d’après Mansart. Mais prenez-vous par les hanches et admirez plutôt les vitraux de Le Chevalier, on est pas là que pour un cours d’Histoire.
VII.
Ha la chapelle de la vierge et sa clef de voute suspendue gothique, on essaye de respecter l’ambiance recueillie, alors malgré la pénombre et les chandelles on se galoche plus tard …
VIII.
Ho, un petit escalier, on s’approche de la statue de Saint Gervais du XVIIeme. Bois très poli, grosse marque de travail et d’assemblage. Allez on se lance et on dit que c’est du poirier, vos connaissances en bois ne laisserons personne de marbre… En bonus on remarque les traces de blanc sur la robe signe des nombreux repeints et le look capillaire ultra contemporain du saint Protais à côté.
IX. SPOILER ALERT : Si vous n’avez pas encore fini la bible, la sculpture en face de vous peut littéralement vous niquer le suspense …
Le Christ en croix de Preaut. L’anecdote est connue, cette sculpture a été refusée par deux églises qui trouvé que la représentation de la douleur du Christ était trop réaliste. L’artiste a menacé de se convertir à l’Islam si personne ne lui prenait son œuvre. Montrez que chez Retard on n’est pas nés de la dernière pluie et que quelques siècles avant un certain Grunewald allait vachement plus loin dans la souffrance et d’autres ont continué. Le sculpteur étant un proche d’Hugo et Baudelaire, on va se dire qu’ils ont peut-être un peu forcé l’histoire pour se donner un côté artiste maudit … Passez quand même cette anecdote si vous voulez vous aussi vous faire passer pour un maudit broyé par l’incompréhension que suscitent vos activités annexes …
X.
Attention là on commence les choses sérieuses, ici se trouve le coin tranquille de l’église. Pas loin du joli confessionnal on peut s’accorder une pause bienvenue. Et qui dit pose dit s’asseoir, qui dit s’asseoir dit être côte a côte, et qui dit être côte a côte dit … que si vous voyez pas où je veux en venir, on peut plus faire grand-chose pour vous (bon, si vous êtes venu avec votre mamie … Et si avec votre mamie vous voyez où je veux en venir un psychiatre peut faire quelque chose pour vous). Si vous avez besoin d’un coup de pouce supplémentaire le groupe sculpté à côté c’est une Pietà. Du Latin Pietas/Pietatis F, l’amour de la patrie, de la famille, dans le sens du dévouement au siens. Donc quand la maman de Jésus tient le cadavre de son fils elle manifeste sa dévotion au fiston d’où le nom.
XI. L’ANECDOTE QUI VA GRAVE LUI FAIRE PÉTER LE SOUTIF
Ici on trouve une statue de la vierge (notre dame de bonne délivrance), c’est François Premier qui la met dans l’église après qu’elle ait été capitée trunquée par un protestant. Catherine de Médicis, une première Dame Italienne parmi d’autres, s’agenouillait pas mal devant cette petite chose ( comme d’autres quoi …). Une certaine Mme Acarie a eu une extase d’un dimanche entier devant. Petit bonus, elle a longtemps était placée dans la chapelle d’un certain Damours. Finish moove : Femme enceinte, première Dame, extase, Damours. Pas besoin de faire un dessin…
XII. LE MOMENT OÙ SOIT TU PASSES POUR UN GROS CON SOIT T’ES DÉFINITIVEMENT DANS LE COUP
Je mets une pièce que devant cette plaque, vous allez vous bruler les yeux à savoir ce qui est écrit. Allez, de rien : Bonne gens plaise vous savoir/Que cette presente Église de messei/Gneurs saint gervais et saint pro/Thais fut dediee le dimanche de/Vant la fette de saint simon et s/Jude lan mil quatre et vint / (le petit signe se traduit par, « par » justement) La main de reuerand père en dieu. Maitre/ Gombant eveque dagrenie et fera a tous/jours la feste de la sainte dedicace le dimanche devant la dite feste de saint simon et saint juif s il vous plaise y venir… j’ai la suite mais faut quand même que vous vous impliquiez un minimum.
XIII.
Si vous voulez vous la jouer mystérieux, on accède ici à la chapelle dorée. Comme elle n’est pas visible (et en partie détruite) imaginez les superbes boiseries dorées qui l’ont décoré, et pensez à son commanditaire, Antoine Goussault, qui devait essayer de faire la même chose que vous en 1628, mais dans SA chapelle.
XIV.
Bon comme Jésus à la XIV station du chemin de croix il est temps de finir un peu l’histoire et d’amener là ou vous voulez la personne que vous venez de crucifier par moultes anecdotes. Donc passons à « que faire après ? » On sort par le fond de l’église rue des Barres et on s’assoit sur les murets de la crèche pour un peu de romantisme (possibilité ballade sur les quais de Seine).

La rubrique « que faire après » vous est offerte par les moines trappistes.
Si on veut boire un thé on va à « L’Ebouillanté » (De 12H et 19H, Thé à 4,90, pâtisseries 7, et bisous à la jolie serveuse rousse susnommée Garance). Ceux qui veulent claquer leur PEL iront manger « Chez Julien », restaurant style « Belle Epoque » avec serveurs en costumes et déco Bourgeoise à souhait. (A partir de 22 balles pour un plat, lâchez-vous carrément et envoyez-vous la brioche perdue chantilly caramel ½ sel à 11 balles).Pour s’encanailler un peu, on tourne à droite a la maison à Colombage (deux bancs sur une micro place, je vous fait pas un dessin) et après une petite pause on rejoint la romantique rue cloche percée pour ensuite boire un coup au Stolly’s. Sortez vos cuirs messieurs et commandez un Manhattan pour tenir toute la nuit dans l’enfer du Marais…
Sur ce je pense que là on a fait tout ce qu’il était humainement possible pour vous…
NB : Amis historiens, amateur d’art religieux éclairés, Lorant Deutsch, ce guide n’a pas la prétention de détenir la vérité absolue et l’erreur est humaine. Mais si vous voulez vraiment vous la raconter à mort, allez-y quand même en démolissant tout ce qui est écrit au-dessus pour épater la galerie. On ne vous en voudra pas, on ne pense qu’à votre bonheur.