Malgré tous les articles qui proclament que Tinder et OkCupid auront la peau des histoires d’amour comme on les connait, une sévère exposition aux comédies romantiques nous donnent toujours envie d’y croire. Et quand je dis « nous » je veux dire « moi ».
Alors l’autre jour, quand j’attendais mon bus un arrêt plus tôt que mon arrêt habituel, j’ai eu envie d’y croire. Je vois du coin de l’œil un mec qui me tourne autour. Semi-réveillée et sans mascara, je ne regarde pas trop. Puis il m’aborde, « Hey, je te vois dans le bus tous les jours et j’ai pas envie que tu te sentes obligée de me parler mais je me disais qu’on pourrait se dire bonjour quand on se voit. ». Aw, enfin un mec qui sait ne pas s’imposer ! Je regarde mieux, et miracle, il ressemble un peu à Justin Theroux (le mec de Jennifer Aniston, tu lis pas People ou quoi ?), alors pour préserver son anonymat je l’appellerai ici Justin. On monte dans le bus, on discute un peu, il est plutôt sexy avec sa voix grave et malgré son accent écossais à couper au couteau. Puis on monte à l’étage du bus mais il n’y a pas de places à côté alors je finis de me maquiller tranquillement. Et sans échange de numéro.
La semaine suivante, je bois un verre au pub du coin de la rue de mon bureau avec deux collègues/amis. Je sors mon museau de mon verre de Prosecco et Justin apparaît devant moi. Comme par magie. On discute un peu et il me demande mon numéro de téléphone, que je lui donne en le prévenant que le lendemain je pars en vacances à Bali donc on se verra à mon retour.
Ellipse narrative de deux semaines et je suis rentrée de Bali mais le dernier soir de mon séjour j’ai été jetée dans une piscine. Toute habillée (en soutien-gorge et booty-short quoi). Avec mon iPhone dans la poche. Malgré son séjour dans un sac de riz, l’iPhone ne ressuscite pas. Je suis un peu triste. Tant d’obstacles entre l’homme de ma vie et moi ! Et puis je ne prends plus trop le bus, je marche ou je cours. Heureusement, les dieux de la comédie romantique sont avec moi et il pleut si fort que je me résous à le prendre, toute mignonne avec mon grand chapeau (je n’ai pas de parapluie). Toute seule à l’arrêt, je lève la tête et évidemment, Justin est assis tout devant, à l’étage. Je grimpe et il m’explique qu’il prend plutôt le vélo et que c’est la première fois depuis qu’on s’est parlé qu’il prend le bus. Il me propose de m’arrêter au café à côté de nos bureaux respectifs et j’arrive donc au travail en retard, un black americano à la main et un grand sourire sur les lèvres. Sans téléphone, je lui ai laissé mon adresse mail.
Ce qui nous amène à l’acte final de notre romcom. Ce dimanche, après une séance de yoga éreintante, je vais voir ma copine Polly jouer à Hackney Wicked, une sorte de festival de quartier un peu à l’est de mon ‘hood. Après le concert, alors que je suis en pleine conversation avec des amis, surgit… Justin, vous l’aviez deviné. Je lui lance « Mais c’est pas possible, tu me suis ! » et une chose en amenant une autre, je l’invite à rejoindre mes amis qui m’attendent au pub. C’est là que les choses se corsent, car entre ma copine Kaitlin, Justin, son frère et moi, aucun ne connait le pub. Kaitlin dégaine son iPhone et un plan apparait mais on est à un croisement et on ne sait pas par quelle direction commencer. Justin lui lance alors, avec un ton bien prétentieux que je ne lui soupçonnais pas « C’est toi la chef de l’expédition, mais perso grâce à mon job je sais comment lire une carte. ». Échange de regards entre Kaitlin et moi. Alors qu’on marche, les deux frères se plaignent bien fort d’être morts de faim. On leur rétorque que nous aussi mais il y aura sûrement de quoi survivre au pub. Après une dizaine de minutes rendues pénibles par notre incompréhension face à leur accent, on arrive à destination, fait souligné par Justin qui trouve le temps entre deux gros soupirs de nous annoncer qu’il est « bien content d’être arrivé« , car il en avait assez de marcher. Je m’empresse de commander un Coca light et de m’asseoir à la table de mes amis dans le jardin. Justin arrive alors et de sa voix tonitruante, annonce « on a un gros problème ». Douze paires d’yeux se tournent vers lui. « Ils ne servent plus à manger. » Personne ne sait quoi dire. Scandalisé, il reste là à attendre une réaction qui n’arrive pas. Awkward. Enfin, il informe le groupe : « on s’en va. ». Dès qu’il s’est un peu éloigné, tout le monde rigole. J’explique « ouais désolée, c’est mon copain du bus. J’espère que je ne vais pas le revoir de sitôt. »
Alors je vais retourner sur Tinder si ça ne dérange personne.