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mardi, 09 juin 2015

Running joke

Par
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D’aussi loin que je m’en rappelle, le sport a toujours été pour moi synonyme de souffrance. Au sens propre, quand je faisais du judo (ceinture jaune-orange, don’t mess with me) comme au sens figuré. Je n’évoquerai pas de souvenirs clichés du genre « toujours la dernière choisie quand on faisait des équipes à l’école » car ça ne m’est jamais arrivé, mais le traumatisme a tout de même commencé au collège. D’abord les cours de piscine où je jongle entre mes complexes pubères, ma nullité en natation et la moquerie adolescente masculine, puis les cours « d’athlé » pendant lesquels je me ridiculise parce que je ne sais rien lancer à plus d’un mètre : ni un javelot, ni un poids, ni même mon propre corps. Pendant 7 ans, deux fois par semaine, j’ai donc traîné des pieds jusqu’au vestiaire du gymnase avec autant de motivation qu’un mineur allant au charbon… Au bac, j’ai tout de même réussi à avoir 12, note probablement obtenue par pitié.

Je n’ai plus fait de sport jusqu’en 2011. Après tant de temps sans activité, pourquoi s’y remettre ? Eh bien, j’habitais Paris depuis peu, nouvel appart, je commençais à travailler, j’avais atteint presque tous mes objectifs d’étudiante provinciale. Une seule chose manquait à ma vie pour la rendre parfaite : faire du sport. J’ai alors découvert la gym suédoise. C’était sympa, moins premier degrés que du fitness, bonnes playlists, mouvements ludiques mélangeant danse, cardio, musculation… À chaque fois, au bout d’1h, je sortais de la salle, transpirante et fière. Pendant 3 ans, j’ai suivi des cours de manière plus ou moins assidue. Comprendre : je payais des abonnements annuels alors que je ne me motivais que 4 mois sur 12. C’était déjà un bel effort, si on tient compte de mon historique personnel avec le sport. Mais c’était pas assez.

Récemment, j’ai ressenti une pression plus forte que celle du lycée.

Moi quand je croise des gens en train de courir sur les quais.

Aujourd’hui, on n’a plus le choix. Il faut être bonnasses, il faut manger ses légumes, il faut courir en bande, pour une marque ou une autre, il faut préparer l’été à coup de programme abdos-fessiers de l’enfer. Sur Instagram et Twitter, on affiche ses performances avec des belles photos et des hashtags suants. L’an dernier, poussée par la curiosité (et je dois l’avouer, l’envie de devenir moi aussi un avion de chasse) je me suis donc mise à la course à pieds – aussi et souvent appelé running désormais. SOUFFRANCE à nouveau. Impossible d’aimer ça. Et pourtant… Il m’aura fallu du temps. Des mois. Je vous raconte après.

Pleine de bonne volonté et animée par ce nouveau goût de l’effort, je tente d’autres expériences. Il faut savoir que j’adore aller à la piscine mais à Paris ça me dégoûte. Même remarque pour le vélo. J’essaye donc le crossfit. Je n’aurais pas dû. Ça a été la catastrophe (désolée Gilles, c’est pas ta faute). Wod, squats, burpees… le jargon est à l’image de ce sport : plutôt barbare. J’ai eu des courbatures pendant deux semaines.

Le mois dernier, dans un élan de stupidité motivation et pour investiguer en vue de cet article, j’ai traîné mon gras et mon amie Marine dans une session du Nike Women Club. Après un petit run de 4km, ils nous ont fait faire une séance de « cardio expert ». On a cru qu’on allait crever, entourées de petites meufs fluo, iPhone 8 à la main, prêtes à prendre en photo n’importe quelle quote présente sur les murs et moins cool que « just do it » (pourquoi vous faites ça les gars, vous avez la meilleure baseline du monde ?). Nevermore comme dirait Verlaine.

Moi au premier kilomètre.

Moi au deuxième kilomètre.

La semaine dernière, j’ai fait ma 1ère séance de pilates. Je vais vous dire des trucs « bateau » ou que vous savez peut-être déjà mais c’est vraiment cool : les muscles travaillent en profondeur, on doit se concentrer sur soi, l’équilibre de son corps et sa respiration. Des trucs utiles pour la vraie vie. Je voudrais continuer à en faire, comme ça j’aurai la course pour me défouler et le pilates pour me muscler en douceur.

Je reviens donc sur mon amour tout frais pour le running car il est lié aussi à tous ces trucs que j’ai testés. Je me suis rendu compte de ce que je n’aimais pas (les runs en équipe, les sports agressifs) et de ce que j’aimais. Le processus a été long, mais j’ai remarqué que courir avait eu un impact génial sur l’ensemble de ma vie : je me tiens plus droite, je respire mieux, je mange mieux, je bois toujours des litres de bière et je me tape des grosses pizzas mais maintenant je culpabilise moins. Mon nouveau crédo : courir plus pour manger plus.

Mon t-shirt préféré

J’ai aussi lâché prise. J’ai arrêté de me comparer à toutes ces meufs trop bonnes ou ces mecs-fusées, je serai jamais comme eux et c’est pas grave en fait.

En général, je cours en legging pourri Gap ou Uniqlo et avec un t-shirt pas du tout termo-respirant-micro-absorbant. Je me suis juste acheté des super baskets, parce que j’adore ça et que c’est important quand même. Pas besoin d’équipe sur-brandée, ce que je préfère c’est courir en duo, avec mes copains : Margaux, Marine, Oriane ou Antoine. Sur mon Instagram, vous ne tomberez pas sur des selfies avec le nombre de kilomètres que j’ai parcourus (à part peut-être celui-là). Je ne pense pas courir un jour un marathon, ni même un semi (à part peut-être celui-là). Lolz. Voilà, vous l’aurez compris, je fais ce qui me plaît et j’essaye de le faire de mon mieux.

En fait, je n’ai pas toujours détesté le sport. Petite fille, j’adorais courir dans le jardin avec mes frères ou dans la cour avec mes camarades. Je crois avoir enfin retrouvé ce plaisir innocent de l’enfance : courir sans autres buts que de se dépenser, de prendre l’air et de s’amuser. Sans autre pression que celles d’un gilet de survêt.

Et toi qui me lis, si tu n’as pas encore trouvé TON sport, tékaté ça viendra. Un jour toi aussi, t’auras plus qu’à te dire « JUSTE FAIS LE ».

Marion

Marion a 27 ans et un pull American Apparel trop beau pastel. Actuellement chargée de communication digitale pour un très joli musée parisien, on nous avait mutuellement dit qu'on devait faire connaissance, parce qu'on s'entendrait mégabien. C'était vrai. Aujourd'hui, grâce à un talent IMPRESSIONNANT d'organisation et parce qu'elle est drôlement cool, Marion intègre la Team et va s'occuper de l'événementiel, de notre communication et des partenariats. Elle nous a déjà proposé de contacter les marques de tampons. Elle a tout compris à l'esprit Retard.

Monna Satellite

Monna a 25 ans et une passion pour les documentaires musicaux. Après avoir terminé ses études d'illustrations médicales et scientifiques (GROSSE CLASSE) et ses cours de psychomotricité, elle est devenue tatoueuse et a vécu dans un squat (BAM ! CA C'EST UNE MEUF QUI A DES COUILLES). Aujourd'hui illustratrice et tatoueuse, son rêve est de s'installer au fin fond des Pyrenées pour profiter à la fois de la mer et de la montagne et de faire son métier dans son jardin, "'A la bien" comme dirait Soprano. C'est tout le mal qu'on lui souhaite.