Je sens que le moment est venu de te dire au revoir.
Je sens que je n’ai plus l’énergie de continuer. Que mon cœur est trop blessé de nos disputes.
Mon amour nous nous étions dit que nous n’en arriverions jamais là. Pourtant nous y sommes. Là où chaque mot est choisi pour ne pas froisser l’autre. Là où toutes les discussions peuvent déraper. A la maison l’ambiance est lourde, le quotidien pesant.
C’est au pas de cette porte que je t’ai rencontré il y a 5 ans. L’homme qui souffre, l’homme qui subit, au côté d’une femme qu’il n’aime plus.
L’homme qui pousse sa femme à le quitter.
Alors avant que les choses ne deviennent encore plus dures, avant que je sois asséchée de larmes, avant que mes utopies ne disparaissent, je préfère que nous arrêtions là.
J’ai cru être celle qui te donnerait le sourire, apaiserait ton cœur. Celle avec qui les courses ne seraient plus un calvaire, celle avec qui tu trouverais plaisir à être père.
J’ai essayé. Je t’ai aimé absolument, comme sans doute je n’aimerais plus jamais. Je t’ai rentré dedans, je t’ai collé. J’ai rêvé que tu m’aimes d’un amour absolu. J’ai voulu être parfaite, unique. J’ai voulu que tu sois fière de moi, j’ai tout mené de front. J’ai monté une entreprise, élevée tes enfants, puis la notre. J’ai continué à m’épiler, à baiser, à sortir, malgré les nuits où seule je me levais. Pour faire bien, pour toi, pour notre couple. Pour être « ceux qui y arrivent », à tout concilier, à continuer à jouer de la musique, à sourire, à rire, à être une bonne mère, une amie, une amante, une entrepreneuse.
Et puis tu m’as abandonné. Pendant que je luttais pour donner naissance à notre fille. Pendant qu’elle grandissait à l’intérieur de moi, pendant que je devenais mère, tu as disparu. Dans tes peurs, dans les doutes, dans ce que tu dis ne pas savoir faire. Tu t’es volatilisé de mon lit, absenté des luttes pour le sommeil de notre fille, absenté pour mes questions à moi. Et tu n’es jamais revenu… Et j’ai cru que c’était normal, que ça allait revenir. J’ai continué à essayer de te faire jouir. Et ca n’arrivait plus que pendant le sexe. J’y étais réduite. J’ai été marqué de cette grande solitude. J’ai perdu le début de mon mari. Tu t’es saoulé dans ta musique, le ménage excessif, les courses, la difficulté à t’occuper des enfants, les évènements de la vie que tu accueilles comme des « claques » ou des fardeaux. « je veux juste être tranquille » a été ta phrase favorite.
Et puis moi aussi j’ai abandonné. Je l’avoue. J’ai lâché prise. J’ai lâché mon mari. Ma volonté que ça aille. Ma volonté de me faire aimer et encore moins pour ce que je suis. J’ai arrêté de porter, d’accepter et aussi de refuser, j’ai accueilli les disputes, je me suis engouffrée dedans et j’ai beaucoup souffert. J’ai entendu tous les mots, même ceux qui dérapent et je ne les ai jamais oublié.
J’ai entendu tes reproches, j’ai entendu tes désaccords sur mon comportement et mon travail. Je me suis sentie trahie souvent, injustement jugée, lâchée dans ma vie professionnelle et celle de maman.
Je n’ai plus personne à qui parler chez moi.
Et ce chez moi est petit à petit devenu ton territoire, celui où tu rumines, celui qui doit être beau et propre, tout le temps, celui où je ne fais jamais assez, où je ne range jamais comme il faut, où je ne suis jamais assez présente…
J’ai de moins en moins de MOI chez NOUS.
Tu dis avoir besoin de ma présente mais sans que je ne dise rien. Tu ne supportes pas mes questions, mes remarques, mes propositions. Tu veux être tranquille, qu’on te lâche, pourtant tu veux que je fasse plus, de tâches, que je travaille moins. Tu ne me dis plus bonjour quand je rentre le soir. Tu ne me demandes plus si j’ai bien dormi la nuit. Nous partageons notre lit mais plus nos rêves.
Tu as une famille mais tu n’aimes pas les activités en famille. Je sens qu’en fait tu n’as envie ni besoin de personne, et surtout pas de moi.
Il y a 5 ans tu aurais pu être mon amant. Je t’ai choisi comme mari.
J’aurais pu continuer à te faire rêver, à voir la fierté et l’envie dans tes yeux, à être ta muse. Mais je suis devenue ta femme.
Ensemble nous avons reproduit les schémas qui n’en finissent plus, ceux de nos peurs, ceux de nos parents, ceux de ton ex. Avec la peur que la vie passe trop vite, nous avons voulu être de la partie, de ceux qui osent, malgré les conventions et sans réfléchir, la tête baissée nous avons tout raté.
Alors, avant que ce déni que je vois dans tes yeux ne te mène à lever la main sur moi, avant que je ne saute de la voiture, avant que nous sapions la jeunesse de nos enfants, avant qu’il ne reste plus aucun souvenir heureux, avant que tu ne me répugnes, sauvons l’histoire que nous aurions pu avoir.
J’ai toujours su au fond que cette tâche me revenait. Je te quitte.