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mardi, 05 novembre 2013

UN JOUR JE SERAI ÉCRIVAIN

Par
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Encore un jour.

Encore un putain de jour de passé sans que j’aie trouvé le temps d’écrire. Enfin, écrire, ça je le fais à longueur de journée, c’est même à ça qu’on me paye. Mais avant de me plaindre, il faudrait encore que je prenne le temps de vous expliquer.

À 20 ans, j’ai écrit un livre. Comme apparemment un paquet de français, enfin ça c’est ce que raconte le JT. Pendant des semaines, des mois, j’ai gratté le papier. Oui, parce que moi qui avais un blog et Word sur mon ordinateur portable, je n’ai rien trouvé de mieux que d’écrire dans des cahiers Moleskine. Ça attirait l’œil dans le métro, une fille agitant son stylo sur des pages et des pages. Un après-midi, j’étais assise sur un trottoir, à Montréal, et il était terminé. Enfin.

Et puis… Je l’ai rangé sur une étagère et n’y ai plus touché avant un bout de temps. Deux ans sont passés, peut-être trois, avant que j’ose rouvrir ces carnets. Pourquoi ? Parce qu’ils représentaient une époque, un pan de ma vie pas forcément rose, et que j’avais peur d’y retoucher, de me relire et de trouver toute cette prose gnangnan et tout simplement décevante, à peine du niveau du blogueuse en classe de 5e. Et finalement, un jour, il faisait beau, ça devait être l’été et j’étais dans mon jardin, et je les ai rouverts, non sans appréhension. Et là, j’ai constaté que le temps avait eu du bon. Je ne reconnaissais plus les mots, les enchaînements, j’avais oublié une foule de détails. Bien sûr, j’en étais l’auteur, mais c’est comme si je lisais l’écrit d’une autre. Et c’était pas mal, pas mal du tout. Fière de moi, je me prends d’une envie : le retranscrire sur l’ordinateur, histoire de le partager avec des proches, de récolter leur avis.

Oui, je vais m’y mettre, un peu d’huile de coude et des heures devant mon traitement de texte et ce sera plié.

C’était il y a 3 ans. Depuis, j’ai tapé l’équivalent d’une soixantaine de pages, et je suis loin du compte. Depuis, j’ai enchaîné les stages, trouvé un boulot, un mec, un appart, et me suis faite rattraper par tous ces petits riens qui m’éloignent de ce projet. Oh bien sûr, c’est en partie de ma faute. Comme on le dit, le temps, ça se trouve. Sauf que… Sauf qu’à passer mes journées à débiter mes articles, je n’ai plus assez d’énergie pour passer à la suite. À rêver de devenir journaliste, puis en le devenant, j’ai délaissé l’écriture. Et du coup, mon roman stagne, triste dans un coin. Et je suis triste. Et j’en deviens mauvaise.

Tenez, il y a quelques mois, j’apprenais qu’une de mes amies sur Facebook, une ancienne collègue de travail, avait publié son premier livre. Une histoire « girly hihi olalala j’aime trop le vernis », de la chick litt à mille lieues de ce que je lis. Je ne juge pas, hein, moi aussi j’ai lu les « Confessions d’une accro du shopping » et ai fini par détester l’héroïne. Des histoires, il en faut pour tous les goûts. C’est juste que la mienne a autant de sens, et autant sa place sur une étagère (enfin, ça c’est moi qui en juge et je suis pas objective, hein, mais pas mal douée pour l’auto-critique, donc c’est pas de la bouse, promis). Et me voilà qui enrage devant mon écran. Bien sûr, une part de moi est contente pour elle, mais l’autre, celle qui meurt étouffée sous les obligations, celle que je laisse pourrir dans un coin, elle lui en veut, à elle, d’avoir réussi là où j’échoue.

Certes, je suis encore jeune, et fichtre, je vais y arriver, à le retranscrire. Surtout que la suite est là, tout prête, dans ma tête, je peux vous la raconter dans le détail. Je l’ai d’ailleurs fait, autour de pichets de bière, à une copine même pas saoûlée que je lui déroule tout le scénario le temps d’une longue soirée. Et puis, je l’ai même commencée, a y est, je me lance, casse-toi l’angoisse de la page blanche. Mais j’ai toujours peur. Peur de finir aigrie, avec plein de rêves en tête et pas la niaque de les réaliser. Peur de finir comme certains frustrés, avec des « Et si j’avais su », « Et moi aussi je pourrais ». Je veux dégager le conditionnel, donner de la voix, gueuler un bon coup. Et qui sait, un jour être publiée. Oh, je compte pas en vivre, merci, y en a 15 en France qui trustent le marché. Mais juste, un jour, passer le pas d’une librairie, balayer du regard les rayons et y trouver mon nom. Ouais, j’en serais fière. Et qui sait, ça pourrait vous plaire.

Bon allez, quand est-ce que je commence ?

catherine

Catherine a 26 ans et un petit chat trop mignon qui ne pense qu'à bouffer. Ancienne critique culinaire, elle est dorénavant journaliste beauté et bosse dans le même open space que Marine (nos chaises de bureau se touchent, trop choukis). En attendant de publier son premier roman et de réaliser 1000 projets dont un qui comporte un poney, elle nous file parfois du rouge à lèvres gratos et nous conseille niveau bouffe (tu savais que ça existait le crumble salé ? DINGUE)

Bobby Dollar

Bobby a 23 ans et une casquette des Grizzlies de Vancouver. Ce jeune dessinateur qui sait quoi faire de ses feutres nous a un jour contacté de son plein gré, et c'est un truc dont on est bien contentes. On espère qu'il arrivera à vivre de son talent de malade et qu'il montera prochainement son projet de magazine de football pour les tout-petits. C'est pas les bébés qui servent de ballons hein rassure nous ? HEIN BOBBY C'EST PAS ÇA HEIN ?