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mardi, 10 mai 2016

What it’s worth

Par
illustration

« It’s a statement, for what it’s worth.

Il y a eu un temps oû cette ville a été une première fois. un terrain neutre oû commencer quelque chose de neuf. Une étendue de rues, de détours, de soupirs, d’expériences. Un endroit où tout semblait possible, parce que rien ne me rattachait à elle.

Les nuits où nous sortions en bande était comme un plan séquence, et chaque échappée semblait amener plus de rires, plus de doutes, plus d’amour.

Nous partions pour des heures, afin de laisser aller chaque membre à une frénésie extatiqus. et si nous rentrions tard, aux lueurs de l’aube, cela n’avait pas d’importance, car nos lendemains se lavaient les mains des obligations de la veille.

Maintenant, je peux à peine me souvenir des bruits de pas qui résonnent dans les cages d’escaliers que nous dévalions, l’hystérie qui nous portait s’est ternie, la joie qui nous faisait planer s’est réduite à quelques piles d’images imprimées, traînant sur un coin de table.

Je ne sais pas si nous avons grandi ou si je me suis assoupie, je sais par contre que les étreintes se sont muées en souvenirs, que certains visages se sont éloignés dans la brume d’un matin froid pour ne jamais revenir. Je sais aussi que certains d’entre eux se sont transformés, passant avec tendresse de l’amant à l’amie, que d’autres se sont imposés à moi comme une évidence.

Que d’une tribu à l’autre, nous valsions, incertains. Que certaines décisions ont effacé des rêves au profit d’une réalité.

Le temps de l’égarement, le temps des rondes incessantes, que l’on passait à observer les feuilles qui valsent dans l’automne, s’est mué en besoin.

Il n’y a pas de chaleur plus douce que celle d’un béton chauffé par le soleil, qui glisse sous la vitesse, pas d’odeur plus attendrissante que celle d’un réveil oû se mêle confidence sur l’oreiller et rayon de soleil de midi. Pas de musique plus apaisante que celle des pas qui crissent sous une neige fraîche, pas de rythme plus entraînant qu’une main qui nous trouve dans la foule. la tête en arrière, les yeux ouverts de ne rien voir, et les palpitations au fond de la gorge, et soudain, ça n’a plus d’importance, la nuque frissonne sous la caresse, l’eau coule entre tous les pores,et au matin il n’y a plus de souvenirs.

Et le temps s’efface, emporte l’instant, laisse l’empreinte d’une mémoire un peu trouée, acide, amère.

Puis il reste les images.

Pour ce que ça vaut, au profit d’un sourire, je compile des souvenirs. »

Maxime Roy

Maxime Roy est né en 1986 et adore sa cafetière. Graphiste et illustrateur (t'as d'ailleurs surement vu son travail chez Gonzaï, fais pas genre), il nous en a mis plein les mirettes en illustrant un papier sur Conan O'Brien : sérieux, t'as vu les couleurs, les formes et tout ? Un breton plutôt malin avec ses mains, même si il ne sait pas encore siffler correctement avec ses doigts.