Mercredi dernier, je suis allée au Lido. J’avais peur au début et j’ai eu raison. Je tiens à préciser que j’ai été invitée dans le cadre de mon travail, jamais j’aurais payé pour aller me frotter à des sexagénaires bourgeois et surtout russes (n’y voyez aucun racisme, j’adore les Russes, par exemple une fois j’ai bu de la vodka)
J’étais accompagnée de ma collègue, que nous appellerons Monique pour des raisons évidentes d’anonymat. Notre moyenne d’âge frôle les 21,5 ans, ce qui est peu comparé aux statistiques de fréquentation du lieu.
On rentre dans la salle, au moins quatre personnes nous appelle « mesdames », je me dis que finalement mon déguisement de femme d’âge mûr est pas trop mal réussi. J’essaye juste de cacher un peu les trous dans mes chaussures, au risque d’être démasquée : « HAN MON DIEU UNE ADOLESCENTE PROLETAIRE S’EST INFILTRÉE DANS NOTRE ANTRE DE RICHES »
On s’installe, une vieille meuf avec un pull mickey (??) (1e wtf de la soirée) vient nous souhaiter un bon spectacle, je souviens qu’à ses yeux je suis censée être une représentante de ma structure, je m’efforce donc de paraître le plus sérieuse possible. Comprendre : je laisse parler ma collègue et je me contente de sourire poliment.
En parlant de Monique, celle-ci fait tout pour rendre cette soirée encore plus gênante qu’elle ne l’est déjà. Elle mitraille le lieu avec son appareil photo de 2004, tu sais celui que mamie avait acheté pour son voyage au Portugal parce que le numérique c’est bien pratique quand même. Monique hèle un serveur en lui montrant notre seau à champagne vide. Oui elle vient bien de réclamer du champagne, j’ai honte mais je reste digne, en pensant déjà à la note qu’on va nous faire payer à la fin si le champagne était pas compris dans l’invitation.
Le spectacle commence, les lumières s’éteignent, les serveurs commencent à se déplacer avec une lampe de poche dans la bouche, ça me fait doucement rigoler.
Les meufs sur scène commencent à danser, en se changeant environ toutes les 7 secondes, ce qui est admirable. Elles sont plus ou moins à poil, avec comme par hasard des seins qui ne bougent pas, moi j’y crois pas trop hein. Je pense même qu’elles ont du fond de teint sur les seins tellement on dirait les mannequins des pages brillantes dans les madame figaro là (oui j’adapte mes références car cette soirée a été placée sous le signe de la droite )
Les mecs sont quant à eux en collant moule bite, fort bien ma foi.
Changement de décor, les meufs reviennent avec des CYGNES MORTS SUR LA TETE, le glamour est total, ça a l’air de plaire aux vieux, tant mieux.
Un peu partout dans la salle on entend les « poc » des bouchons de bouteilles, du coup Monique me ressert du champagne, j’ai oublié de lui dire que je tenais pas trop l’alcool, surtout quand y a des bulles.
Le spectacle continue, c’est de plus en plus kitsch et de plus en plus hétéro, je me demande vraiment ce que je fais là. Même la salle est parfumée aux $$$, genre le parfum de grand-mère qui porte des manteaux en vison. Je précise encore une fois que je n’ai rien contre les grandes mères, et encore moins contre les visons. Même si ça ressemble vite fait à des rats et que les rats c’est dégueu.
Monique continue de prendre des photos, obligé elle va foutre son flash à un moment, je la sens venir gros comme une maison comme dirait ma maman.
Les meufs dansent et poussent des cris de souris, tout le public est très mal à l’aise, moi y compris, donc je finis ma coupe de champagne pour me donner une consistance. Ça ne marche pas trop.
Je me dis que ces demoiselles sont sacrément bien épilées quand même. Un jet d’eau apparait sur scène. Une patinoire ensuite. J’arrête de me poser des questions sur la démarche du metteur en scène (si metteur en scène il y avait).
En fait je réalise que le champagne ça monte vite, je suis donc passablement ivre. Un mec oublie son flash, les gens se retournent alors qu’ils savent pertinemment que c’est un appareil photo et pas un radar, puisqu’on est au Lido et pas sur l’A41.
J’imagine le scénario le plus catastrophe dans ma tête, le mec fait tournoyer la meuf sur la patinoire, ça va très vite, trop vite, elle perd son patin qui tranche la gorge des messieurs au 1e rang. Je souris toute seule car je me fais rire, Monique m’interroge du regard, je lui fais comprendre que non, je lui expliquerai pas ma super blague. Je tiens à conserver le peu de dignité qu’il me reste.
C’est le final, les meufs débarquent avec des paons entiers sur la tête, parce que pourquoi pas.
Ma conclusion : on est quand même sur un spectacle pas très COP 21 dans l’ensemble.
Je sors en essayant de pas montrer à tout le monde que je suis complètement bourrée.
Merci le Lido, je ne reviendrai pas.