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lundi, 18 février 2013

NOTES OF A DIRTY YOUNG MAN / CHRONICLES OF A NINI

« The first time I saw

The dum dum boys

I was fascinated

They just stood in front

Of the old drug store

I was most impressed

No one else was impressed

Not at all

And we’d sing

Da-da-da-da-da-da

Dum dum day

Where are you now my

Dum dum boys are you

Alive or dead

Have you left me the last

Of the dum dum daze

Then the sun goes down

And the boys broke down »

(The Dum Dum Boys - Iggy Pop)

Après cinq ans, je viens enfin de terminer l’université. Je suppose qu’ils ont raison quand ils disent que le travail ça paye. La remise des diplômes était le 10 août, je me rends compte en écrivant que ça fait exactement quatre mois, quelle coïncidence. Ça fait quatre mois que je fais des aller-retours aux États-Unis, mais j’habite au Mexique de façon presque permanente.

Quatre mois de Londres, Paris, Austin, Guadalajara, San Miguel de Allende, et la semaine prochaine, la côte pacifique mexicaine et Mexico.

Je me suis heurté à toutes sortes de personnages pendant ces derniers mois. Début septembre, je me suis retrouvé à lire le manuscrit d’un cinquantenaire antisémite avec lequel j’avais sympathisé quand je vivais à Paris, l’année dernière. Il voulait des conseils et je me suis empressé d’accepter : il s’apprêtait à envoyer ses écrits à l’ambassadeur du Venezuela en France, Hugo Chavez étant le destinataire final, évidemment.

Je me suis aussi retrouvé à renouer avec de vieux amis. Les amitiés de lycées ne survivent pas forcément longtemps et après être parti à l’université, j’avais arrêté de parler à ces deux mecs. Mais après des années sans nouvelles, la curiosité a eu raison de moi, et j’ai décidé de reprendre contact. Un de ces mecs a la réputation de niquer n’importe quoi sur deux jambes, le second est un dealer qui vient juste d’être l’objet d’une enquête, avant d’être foutu en prison, tout ça grâce à son ancien associé devenu informateur. Résultat: plus de 90 000 dollars en cash saisis par la police, et une tempête de poudre blanche au fond des toilettes. Il a pu garder sa BMW toute neuve et sa Cadillac, c’est déjà ça.

Eux, ce sont les dum-dum boys.

Le fossé entre leur réalité et celle de la plupart des Austinites est immense, leurs univers sont parallèles et voir les deux côtés de la médaille en l’espace de 24h est super rare. Mais c’est exactement ce qu’il s’est passé une nuit de novembre quand je suis passé d’un bar plein de petits-bourgeois vingtenaires à une conversation avec un dealer où il me décrivait sur son plan pour devenir millionnaire. Ils n’ont rien à perdre, et leur principale motivation n’est rien de plus que la recherche de la satisfaction immédiate. Beaucoup diront que c’est le cas de tous les jeunes, mais pour les mecs dont je parle, c’est extrême. Et pour être honnête, cette stupide satisfaction immédiate était exactement ce que je recherchais quand j’ai pris la décision de reprendre contact avec eux. Et c’était aussi exactement pour ça que j’étais ami avec eux quand j’étais adolescent. Ça attire les filles, est-ce que j’ai besoin d’une autre putain de raison?

Au diable les conséquences.

J’avais arrêté de parler à ces mecs parce que j’étais convaincu qu’il y avait autre chose au delà de ce dont j’étais au courant. Je n’ai jamais été croyant, mais je pensais que ça valait peut-être le coup de vivre et mourir pour ses idées. Après des années à chercher des idéaux qui valaient le coup de se battre, je suis revenu bredouille. Je n’arrivais plus à me persuader de suivre un système de valeurs, quel qu’il soit. Et quand ce genre de choses arrive, il ne reste plus qu’un appétit pour les simples plaisirs humains.

Jouir est la chose la plus proche qu’on puisse imaginer d’une expérience spirituelle, sentir sa queue à l’intérieur d’une chatte humide est la seule union sacrée à notre portée et boire à s’en démonter la tête est la seule façon d’atteindre la lumière.

Que cela soit dit.

Quand j’ai réalisé ça, j’ai décidé de reprendre contact avec les experts en la matière. Des mecs qui vivent pour l’instant présent et dont les principes sont: quelle importance que tu vives ou que tu meures demain? Tu vois une jolie petite pute, et tu ne peux pas t’empêcher de mater ? Tente, si ça ne marche pas, tant pis… t’auras essayé. Si ça marche, baise-la sans capote.

Un homme avisé a un jour dit « tu ne peux pas avoir le sida si tu ne vas pas te faire tester. »

T’as besoin d’argent? Vends quelques kilos de coke. Si tu prends le risque et que tu en sors vivant, tu auras plus d’argent que de façons de le dépenser.

Si tu ne t’en sors pas… bah, pas de chance.

Ce sont les trucs sur lesquels tu paries quand tu joues à ce niveau. C’est tout ou rien. Je me souviens encore comme si c’était hier, de ce gamin de dix-sept ans qui se promet de ne « jamais vivre une vie chiante de fonctionnaire », qui préfère tout risquer pour des plaisirs immédiats plutôt que de « filer droit ». Il a tenu sa promesse, et j’ai été témoin du résultat. Je l’ai vu se faire tabasser jusqu’à ce qu’il soit inconscient, et je l’ai vu finir en prison. Mais je l’ai aussi vu avec les plus jolies filles au bras, buvant et se tapant n’importe quoi, en s’amusant comme un fou. C’était ce qu’il voulait, il connaissait les risques et je suppose qu’il en assumait les conséquences. Il voulait éviter le futur tout pourri qui est réservé à la plupart d’entre nous.

Comme Bukowski l’a si éloquemment dit: « À vingt-cinq ans, les trois quarts des gens étaient foutus. Il ne restait plus qu’une nation entière de trous du cul qui passaient leur temps à conduire des voitures, à bouffer, à avoir des gosses et à tout faire de la pire des façons, comme de voter pour le candidat à la présidence qui leur ressemblait le plus. » (Ham On Rye)

Honnêtement, je dois dire qu’avec le recul, ces jours pleins d’excitation et de dangers font partie des plus marquants de ma courte vie. Bien sûr, le prix que ces mecs ont eu à payer est élevé. Ce genre d’histoires se termine souvent prématurément par la mort ou la prison. Où est-ce qu’ils étaient tous à dix-neuf ans? Toutes leurs histoires suivent le même schéma, elles parlent toutes d’innombrables sentences de prison, de morts (dues à la police ou à d’autres dum-dum boys), de mâchoires cassées et de coups de couteau. Mais je me demande, qui peut dire qu’il n’ont pas plus profité de la vie qu’un pathétique quarantenaire qui a passé sa vie dans les limites que la société lui avait dessinées. À respecter la loi, en gros.

Qui peut dire qu’un dealer hédoniste de vingt ans ne s’est pas plus amusé quand il était vivant ?

On ne peut pas s’empêcher de se demander comment ces gamins finissent par prendre des décisions aussi radicales : Pourquoi prendre ce chemin? Mais je pense qu’il y a une meilleure question : pourquoi est-ce qu’on ne choisit PAS de vivre aussi de cette façon? La réponse à cette question est que pour la plupart d’entre nous, le jeu n’en vaut pas la chandelle. Allez en prison ne vaut pas le coup, se faire tabasser ne vaut pas le coup, et mourir n’en vaut carrément pas la peine. On a des plans, un futur, une carrière, une famille, etc. Mais ces dum-dum boys n’ont rien et quand on a rien à perdre, c’est quand même beaucoup plus facile de jouer.

Le but de ce texte n’est pas de les absoudre d’une quelconque culpabilité, ce n’est pas une façon détournée de déguiser la merde en paillettes, ce n’est pas un rapport informatif sur les pauvres âmes opprimées du fin fond de la ville. Ces gens sont des ordures et c’est tout. Et je ne suis pas non plus à l’abri de ce genre d’accusations.

Qu’on me qualifie de racaille s’il le faut. Mais une chose est sûre… la racaille sait s’amuser.

Approximativement traduit de l’américain par Anna. L’original est mieux, juge par toi-même:

After five years, I have finally graduated from college. I guess they’re right when they say hard work pays off. August 10th was my graduation date and as I am writing this I realize it’s been exactly 4 months since that fateful date, what a coincidence. I have been traveling in and out of the United States for the past 4 months but Mexico has become my almost-permanent residence. In the past 4 months: London, Paris, Austin, Guadalajara, San Miguel de Allende and next week I am heading towards the Mexican pacific coast and then Mexico City.

I’ve dealt with a very diverse set of characters throughout these past months. In early September, I found myself going over a book written by a ~50 year old anti-Semite I befriended while living in Paris last year. He wanted some notes on it and I eagerly accepted to take on the task. He was getting ready to mail his writings to the Venezuelan ambassador in France. Hugo Chavez was, of course, the desired destination.

I also found myself getting back in touch with two old friends of mine. High school friendships usually don’t last and after I went off to college, I stopped talking to these two guys. After years of having zero contact with them, curiosity got the best of me and I decided to get back in touch with them. One of these characters is a guy who gained a reputation for fucking anything with two legs. The other guy is a drug dealer who was recently investigated and put in jail by the police, all thanks to a former associate of his turned informant. The result: Over 90,000 dollars seized by the authorities and a powder storm of cocaine flushed down the toilet. Luckily for him, his brand new BMW and Cadillac were not taken away.

These are the dum-dum boys.

The gap between their reality and the reality of most Austinites is immense, their universes are parallel and to experience both sides of the coin within a span of 24 hours is extremely rare. But, this is exactly what happened one November night when I went from being at a bar surrounded by white, middle-class twenty-somethings to having a conversation with a drug dealer about his scheme to become a millionaire. They have nothing to lose and their main motivation is nothing more than the search of immediate gratification. Most would argue this is the case with all young people but the guys I’m writing about take it to the extreme. And, to be honest, this mindless immediate gratification was exactly what I was searching for when I made the decision to get back in touch with them. This was the very reason why they became my friends as a teenager in the first place. The girls loved it, what other motivation did I need? Fuck consequences.

I stopped talking to these guys because I convinced myself that there must be something else out there. I’ve never been a believer but I thought ideologies might be worth living and dying for. After years of searching for higher ideals worth fighting for, I came up empty-handed. I could no longer convince myself to follow any specific set of values. And when that happens, there is nothing left but an appetite for earthly pleasures. Cumming is as close as one could ever get to a spiritual experience. A hard prick inside a wet cunt is the only holy union within our reach and getting shitfaced drunk is the only way to reach enlightenment.

Once I realized this, I decided to get back in touch with the experts on this subject. These experts were guys living for the moment. Their mentality is: who cares if you live or die tomorrow? Do you see a good-looking bitch (misogyny intended) you can’t take your eyes off of? Go for it, if it doesn’t work out, fuck it…but you have to at least try. If it does work out, fuck her with no condom on. As a wise man once said « you can’t get AIDS, if you don’t get tested. »

Do you need money? Go sell a few kilos of cocaine. If you take the risk and come out alive, you’ll have more money than you’ll know what to do with. If you don’t come out alive…tough luck. These are the stakes when you gamble on such a level. It is all or nothing. I still remember clearly, after all these years, the commitment a dumb 17 year old made by promising himself « to never live a dull 9-5 life. » He preferred to risk it all in exchange for immediate pleasures, rather than “go straight.” He kept his promise and I was witness to the consequences. I saw him being beaten almost unconscious and I saw him go to jail. But, I also saw him with the best looking girls on his arm, drinking and popping pills carelessly while having the time of his life. This is what he wanted, he knew the risk and I assume he accepted the consequences. He wanted to avoid the rotten future that’s in store for most of us. As Bukowski so eloquently put it:

« At the age of 25 most people were finished. A while god-damned nation of assholes driving automobiles, eating, having babies, doing everything in the worst way possible, like voting for the presidential candidate who reminded them most of themselves »

I have to be honest and say that, in hindsight, those days full of excitement and danger were some of the most memorable days of my short life. Of course, the price these guys have had to pay is high. Death and prison are often where these stories reach their premature end. Where were all these guys by the age of 19? The stories follow a consistent pattern. These stories all include countless prison sentences, deaths (either at the hands of the police or other dum-dum boys,) broken jaws and stabbings. But, I ask myself, who’s to say they have not enjoyed life more than a 40-year-old sad excuse of a man who lived his entire life living within the accepted limits society sets for all of us. A law abiding citizen, in other words. Who is to say that a 20-year-old hedonist drug dealer did not have more of a good time while he was alive?

One can’t help but wonder, how is it that these kids ended up making such a drastic decision? Why choose going down that road? But, I believe a better question is: Why do we NOT choose to live our lives this way? The answer is that for most of us the risk isn’t worth it. Going to jail isn’t worth it, being beaten to a pulp is not worth it and dying is definitely not worth it. We have plans, a future, our career, family, etc. But these dum-dum boys have nothing and when you have nothing to lose, gambling becomes much easier.

The goal of this writing is not to absolve them of any guilt. It’s not an effort to shed light on the gutter in order to disguise the shit in glitter. It is not an informative report on the poor downtrodden souls of the inner city. These people are scum and that’s that. I am not immune to the same accusations. If I am to be seen as scum, so be it. But, one thing is for sure…the scum know how to have fun!

Bill Van Cutten

Bill a 31 ans et un chat qu'il aime beaucoup, même si il n'en est pas le papa biologique. Quand on l'a rencontré, il avait une boucle d'oreille et se tapait nos balances dégueu (il était ingé son à l'Espace B). Aujourd'hui installé à Montpellier, comme Nils, il a toujours une boucle d'oreille, est professeur de dessin, continue son projet musical Hyperlion, travaille sur un film d'animation et nous envoie en avance ses illustrations aux couleurs qui émoustillent les rétines. Oui, tout à fait, il a le temps de faire tout ça. Alors nous fais pas chier quand tu veux un "délai".