Rendons hommage aux nouvelles chaines de la TNT qui remplissent leur grille comme ils peuvent avec des épisodes de rediffusions grandioses et en stéréo des « Les Bleus, Premier Pas Dans La Police » ou « Julie Lescaut ».
Ainsi, je découvre HD1. Et l’émission à but non lucratif « Premier Amour », créée, bien sûr, pour rendre service et aider l’être humain dans sa quête de bonheur confus (comme « Avis de Recherche », déjà, si vous étiez né).
Le concept est simple, génial, évident. Les bienveillants producteurs organisent la rencontre d’un homme et d’une femme (on espère rapidement une évolution des mœurs et une ouverture aux couples homosexuels ou unijambistes) qui se sont aimés et se sont perdus. Dix, vingt, voire vingt-cinq ans après. Et nous, spectateur de l’événement, nous frottons déjà des mains devant la promesse de ces pauvres gens se retrouvant face à leur amour de jeunesse quelque peu changé. Disons-le carrément, amour de jeunesse carrément déglingué. Bien sûr, nous sommes censé nous réjouir d’une possible happy end, d’un scénario hollywoodien ou l’amour triomphe de tout : l’argent, le clivage social, l’âge, le sexe, la couleur de peau, les goûts musicaux ou la passion ou non des poils de torse. La fameuse lecture « au premier degré » vendue pour toutes les émissions de real-TV (« La princesse et ses princes presque charmants », le « Bachelor », « Question pour un Champion »…).
Sauf, qu’humain après tout, le véritable plaisir – coupable ou non – s’avère être la découverte des mines déconfites quand l’ex-être aimé apparaît devant les protagonistes. Bah oui Loulou, elle a pris chère et chair Chouchou. Et oui, « bébé d’amour » accuse désormais le poids de quelques années d’alcoolisme et de drogues après son divorce houleux. Oui, « chérichat » a découvert l’importance du Big Mac à outrance pendant une dépression et longue comme un jour…sans pain complet.
On sourit, on jouit, on compatit et on regarde lascivement (oui, dimanche après-midi, gueule de bois, tout ça…) ce spectacle voyeuriste fascinant. Les petits diners foireux avec les amis qu’on se présente, les activités forcées pour « que tu découvres mon nouvel univers ». En gros, la grosse a arrêté d’écouter du punk synthétique hollandais en 1992 pour se lancer dans le karaoké du coté de Melun. On expose ses fêlures, ses regrets. Ca chiale un peu. On se rend compte rapidement que l’autre est aussi con qu’il est devenu moche et chiant. On est mal à l’aise.
De tristes gens qui se raccrochent à leur passé. Espèrent revivre une flamme éteinte depuis longtemps. Nostalgie. La caméra est là, à l’affût Traquant le désespoir et la déception. La déchéance.
Et Diable qu’on se marre.
Vivre les retrouvailles de Jean-Charles, vieux beau parisien, précieux, fraîchement divorcé et père de trois enfants, avec Marie-Solange, ex-mannequin mi-pute mi-pain de mie légèrement liftée depuis son passage à la
quarantaine et vivant de l’autre côté du monde sur l’océan Pacifique, à la cool, hippie dans l’âme et surfeuse émérite, restera un de mes grands moments de télévision 2013. Bien sûr, tout commence bien. Ils sont bien conservés, plutôt fortunés, et immédiatement complices. Les deux tourtereaux vont-ils consommer dès
le premier soir ? On espère. On y croit. Surtout Jean-Charles en fait, un peu en rade depuis sa mid-life crisis. Ahhhhh la jeune femme fougueuse de sa jeunesse perdue… Quand ils étaient insolents,
insouciants. Seulement voilà, les soucis ont blanchi les cheveux de JC.
Rapidement, on sent et l’on sait que tout est voué à l’échec. Génial ! Assistons à la chute du pire romain. Venu sur le territoire de la dame à Los Angeles, vivre la vie de Marie-So (ambiance « Vis Ma Vie » donc), JC déchante. Elle, justement, au coin du feu sur la plage, avec ses amis surfeurs, elle chante. Culte du corps, sport, sable. JC rêve de lire Balzac devant sa cheminée parisienne et n’est pas prêt de porter un short.
Déception, son ex est une adolescente espiègle qui refuse de vieillir. Ce qui était drôle à 20 ans l’est moins à 45…
A chaque fois le scénario se répète.
Et même si un baiser reste possible devant les objectifs rieurs (sans doute un peu poussé par l’équipe de prod’ : « allez embrasse le moche, c’est bon pour l’audimat »), on doute qu’une véritable histoire existe à nouveau. On s’en tape. On est là pour consommer rapidement de la détresse humaine, sous couvert de bonnes intentions. De la « Feel-good TV ». On connait le refrain : « on est là pour aider le gens, pas se moquer ». Bien sûr.
Et franchement quelle idée de faire tout ça devant les caméras : ces gens n’ont-ils pas Copains d’avant.com ou Facebook ? Cela ne leur a pas suffit de voir les photos de profils dégarnies de Mathieu, le beau bosse de Terminale S qui a osé réclamer du sexe oral un soir de boum ?
Et là, je comprends. Je jette la pierre à qui n’a jamais vicieusement tenté de retrouver trace d’un camarade de classe ou d’un ex-flirt pour…se rassurer. Se moquer.
Accessoirement, pousser le vice jusqu’à le contacter pour vérifier que l’on a socialement mieux réussi que lui. Ou qu’il est laid. Que vous ne le toucheriez même pas avec un bâton. Bref, on ne retourne pas avec ses ex. Quelle drôle d’idée.