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lundi, 02 décembre 2013

DIEU E(S)T AMOUR

Par
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Quand je me suis retrouvée cet après-midi de novembre dans cette petite église d’Alsace, je savais déjà depuis plusieurs jours que j’allais passer une mauvaise journée. Je ne me suis pas trompée. Tandis que j’essayais entre deux torrents de larmes de dire au revoir à une des personnes qui m’avait vue grandir, je devais, de plus, supporter le discours d’un curé au sourire niais, qui essayait vainement de nous aider à voir “le bon côté des choses” avec l’aide de son ami imaginaire Jésus.

Ces moments-là me rappellent à chaque fois pourquoi j’ai arrêté de croire en Dieu. Monsieur le Curé faisait en effet une propagande telle pour l’Église Catholique que j’espérais voir apparaitre à un moment une astérisque sur le côté de la Nef Centrale confirmant le publi-édito. Ah ouais, je comprends maintenant l’expression “précher pour sa paroisse”. Ça en était presque indécent.

Pourtant, alors que j’arrivais enfin à reprendre mon souffle, il a émis une phrase, qu’il s’est plu à répéter plusieurs fois. “Dieu est Amour”. Je me suis surprise en train de penser que je m’en foutais, je ne croyais plus à aucun des deux.

Croire. C’est bizarre, cette idée de penser que quelque chose existe alors que tu n’en as aucune preuve. C’est prendre le risque d’être déçu, de perdre son temps, d’être pris pour un con pour peut-être rien. L’espoir basé sur des incertitudes, sans aucune preuve concrète. Une idée m’a alors traversé l’esprit. Est ce que je crois encore à des trucs à 27 ans?

Je me suis mise à faire le décompte. Je ne croyais plus au Père Noël depuis mes 6 ans, à la petite souris depuis mes 7, à Dieu depuis mes 13, renonçant ainsi à la vie après la mort, aux calins de bienvenue de Saint Pierre, au tennis avec Claude François et à l’idée de retrouver tous les gens qui m’étaient chers, quelque part, ailleurs. Je ne croyais plus en l’amour, constatant en 2013 que personne ne m’avait finalement apporté une preuve concrète de son existence, laissant planer constamment le doute : “Je crois que machin et bidule sont fous l’un de l’autre. Ou bien ils sont ensemble pour avoir un plus grand appartement à Paris, je ne sais pas vraiment”.

Je n’avais pas plus d’espoir quant à mon avenir non plus, m’attendant un jour ou l’autre à mourir étouffée sous le boulot ou les détritus dans mon open space, cramée par le réchauffement climatique, ou me prenant une météorite en pleine face, réglant le problème une bonne fois pour toutes.

Est ce que j’ai encore de l’espoir pour un truc, sérieux ? Ou suis-je en train de supporter la vie comme un chemin de croix, d’attendre de crever seule et puis après plus rien ? Pourquoi en plus, me confortais-je dans cette idée, me disant que je ne suis finalement que similaire à n’importe quel autre pelé de ma génération, auquel il faut extraire un peu de magie à grands coups de pieds de biche ?

Il faut le dire, on est tous vraiment pétés pour avoir de telles pensées à même pas 30 balais. Rares sont les gens avec qui je traine qui ont encore un peu d’espoir pour quelque chose, ou qui donnent de la valeur à de l’impalpable. Plus de croyances, plus de rêves. On se comporte tous royalement comme des cons en se disant qu’on ne veut pas risquer de morfler pour que dalle.

Saint Thomas de Pacotille : “je crois ce que je vois”, mais je ne vois rien, alors tant pis.

La constatation soudaine de mon nihilisme de pauvre conne m’a révoltée. C’est vrai, est ce qu’on s’en tamponne pas un peu de savoir si ces trucs existent ? Est-ce que quand un handicapé se relève de sa chaise en criant au miracle divin, on file vers lui, lui dire “nan, mais rassieds toi, Dieu est une invention”?

Bah non, parce que cela n’a aucune importance. L’important, c’est le résultat. Ce sont les vies des gens remplis d’espoir, ceux qui trouvent une consolation dans la mort de leurs proches en disant qu’ils ne sont pas vraiment partis, ceux qui voient dans des petits signes anodins la présence de quelque chose de magique et qui les dépasse, ceux qui réussissent de cette manière à faire de leur vie une somme de petites étincelles incontrôlables qui les font avancer dans la vie comme une locomotive choupette.

L’espoir, merde.

Tu ne peux pas vivre des choses chouettes si tu nies leur existence, ou si tu ne veux pas un peu y croire au début. Ça ne te tombe pas dessus comme ça. Ça naît aussi dans ta tête. C’est l’espoir qui te motive à avancer plus loin, et avancer avec le sourire, à prendre des risques, sans cet air de connasse désabusée que je me connais, ô glorieuse débilos vingtenaire « qui a vécu des choses difficiles ».

Alors, en sortant de l’Église, j’ai séché mes larmes et j’ai pris une décision. Je vais croire. Je vais croire aux extraterrestres, au fait que les gens que j’aime et que j’ai perdus veillent encore un peu sur moi, au fait que Britney Spears ne chante pas en Play Back et au fait que Beyoncé n’ait pas eu affaire à une mère porteuse. Je vais croire que j’aimerai un jour correctement quelqu’un qui en vaudra profondément le coup et qu’un futur meilleur, plein de livres à écrire et de concerts à donner m’attend dans pas si longtemps.

Peut-être que ça finira par se réaliser, qui sait. Peut-être pas. Je vais sûrement douiller, je vais sûrement être déçue. Mais en tout cas, putain, ce dont je suis sûre, c’est que j’aurais vraiment vécu.

Marine

Leader Autoritaire
Marine est née en 1986 et vit avec un petit chien trop mignon. Après avoir joué avec des groupes de filles ultra classes d'après les autres membres (Pussy Patrol/Secretariat/Mercredi Equitation), elle gagne sa vie en écrivant sur des sujets cools et se la pète déjà un peu. Ca ne l'empêche pas de traîner en pijama dégueulasse le dimanche en essayant de twerker mal sur du William Sheller. L'AMOUR PROPRE C'EST DÉMODÉ OKAY.

Chris Fuzz

Christine a 41 ans et une super combi en cuir. On l'a rencontrée ya très longtemps, 2006 je crois, elle était l'une des membres de l'association Get Action ! qui organisait les concerts les plus cools du monde à Paris. Putain, les claques qu'on s'est prises au Gambetta Bar devant King Khan ou les Fatals, c'était fou. Christine dessinait les flyers et elle continue toujours à faire des illus qui claquent. T'imagines même pas comment on a été contentes quand elle nous a proposé d'illustrer quelques uns de nos papelards. Bisou Christine, et longue vie au rokérol. Son site : http://www.christinefezas.com